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Cailloux
aléatoires
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Je
les sème au fil de l'eau. Parfois mots, souvent
images, toujours bruts.
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[vendredi 12 décembre 2003]
Concession
(21:44)

Parfois, une concession au mythe, juste pour ma crédibilité
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[jeudi 11 décembre 2003]
La course
(13:42)
Je suis assis sur un banc, place des cocotiers. J'observe la course des
européens toujours en mouvement, les vois traverser l'espace sans s'y
arrêter, sans le regarder, sans croiser le regard des mélanésiens qui
ont sagement su s'approprier ce rectangle aseptisé tout à la gloire du passé
français, pour le transformer en une aire de repos dont l'occupation
pacifique suffit à déboulonner les statues d'une autre époque.
A mes cotés, un vieux kanak fatigué, sa canne posée dans un fragile équilibre
sur l'accoudoir que lui-même se refuse à utiliser afin de conserver
droiture et dignité, regarde courir les blancs. Peut-être
s'interroge-t-il à mon sujet, sur mes pieds qui se balancent dans
le vide au lieu de marteler les pavés dans un rythme rapide, sur l'immobilité
surprenante du reste de mon corps, sur mes fesses claires occupant
ce banc déserté par les miens?
Pourquoi est-ce que je ne coure pas comme les autres, avec les autres?
Sans doute que je n'ai pas de passé à fuir ni de présent à accomplir.
Quant au futur, il peut bien attendre demain.
Et ce vieillard fier, lui qui a vécu l'histoire que je
n'ai connu que dans les livres, que verrait-il si maintenant, arrêté
place des cocotiers, il se retournait pour contempler le passé et
l'expliquer à ces enfants qui volent autour de lui comme une nuée de
papillons aveugles? Il ne découvrirait probablement que des hommes qui
courent en bousculant des hommes qui marchent et en écrasant des hommes
assis.
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[mercredi 10 décembre 2003]
Page blanche
(22:10)

Parfois le plaisir de l'absence, du non-dit, l'espoir secret, dans un
futur qui sera peut-être, de me retourner sur cette page blanche afin
d'y mettre ce qu'aujourd'hui, je tais.
Alors j'y réinventerais ma vie en lui
donnant un sens, j'y réaliserais mes projets au lieu de seulement les
rêver, j'y ferais coïncider ambition et prétention, je remplirais ce vide
avec des pleins qui ne seraient jamais de trop. Et je raconterais à mes
enfants que, ici, sur cette note qui n'en n'est pas une, là ou j'avoue
tricher par omission, je denouais les fils de mon destin en simulant la fuite,
je construisais mon avenir en préparant le leur,
je forgeais ma légende et que c'est elle,
maintenant, qu'ils contemplent en l'appelant papa.
Hier, à l'heure où d'autres, ailleurs, dégivraient leur voiture, je me
baignais, simplement. Demain, je ne sais pas. Mais aujourd'hui, tout est
possible.
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[mardi 09 décembre 2003]
Le bain
(21:33)

Aujourd'hui je fais silence pour aller prendre un bain dans l'océan. Il sera juste dit que Noël s'annonce différent des précédents, pour peu qu'ici, il ait encore un sens.
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[lundi 08 décembre 2003]
Paroles
(17:54)

Lors de la coutume d'au revoir clôturant le week-end culturel du centre Jean-Marie Tjibaou consacré à la commune de Pouebo:
Si nous avons cassé des tiges de fleurs
Veuillez nous en excuser, car nous sommes des enfants
Si nous avons jeté des cailloux dans l'eau
Veuillez nous en excuser, car nous sommes des enfants
Si nous avons couru dans vos maisons
Veuillez nous en excuser, car nous sommes des enfants
Ici, nous avons soulevé la poussière
Nous avons martelé le sol
Nous avons marqué la terre de nos pas
Comme l'ont fait avant nous les pères de nos pères
Qui déjà, caressaient le rêve de ce culte là
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Et de désigner, sur ces dernières paroles, les cases admirablement symbolisées par l'architecte du centre, Renzo Piano.
La réponse:
De déranger un caillou, ce n'est pas grave
Demain, nous le remettrons en place
De faire tomber un poteau, ce n'est pas grave
Demain, nous le replanterons
Mais de déplacer la parole, c'est très grave
Car demain, il n'y aura plus personne pour la retrouver
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NOTES :
[1] L'allusion aux "pères de nos pères" du vieux kanak de Pouebo fait référence à ses ancêtres venus danser lors du festival Melanesia 2000, en 1975, qui se tint sur la presqu'île de Tina à l'endroit exacte où est construit aujourd'hui le centre culturel Jean-Marie Tjibaou.
[2] J'ai retranscris de mémoire les paroles échangées hier lors de la coutume. Bien qu'il soit fort probable que je les ai quelque peu reformulées, j'ai tenté d'en respecter le fond et la forme. En aucun cas je n'estime les avoir "déplacées".
[3] Il faut aller au centre culturel Jean-Marie Tjibaou. Il n'est pas la coquille vide tant décriée parfois, il n'est pas le jouet accordé par l'état français pour expier ses fautes et acheter la paix, il n'est pas un gouffre sans fond engloutissant l'argent en vain. Il est la meilleurs façon de fuir Nouméa sans la quitter, il est le temple d'une culture que ne doit pas dissoudre et digérer l'europe, il est un morceau de terre marqué par l'histoire et enfin rendu à qui de droit, il est une main tendue à celui qui veut comprendre au lieu de s'enfermer dans ses peurs de l'autre, il est un joyau qui brille dans ce pays exsangue culturellement et ouvre une brèche pour d'autres initiatives, il est le miroir d'un peuple qui ne s'était jamais vraiment regardé. Cette coquille n'est vide que des gens qui n'osent en franchir les portes.
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Dernière
publication le lundi 15 décembre 2003 à 13:27 |
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